Cour Administrative d’Appel Bordeaux n° 11BX01041 du 16 avril 2013.

La commune de Carmaux demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement n°0700632 du 17 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’arrêté du 21 décembre 2006 de son maire retirant le permis de construire accordé à M. et Mme A...le 24 août 2006 en vue de la construction d’une maison ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme A...devant le tribunal administratif de Toulouse ;
3°) de lui allouer la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que, par un arrêté du 24 août 2006, le maire de la commune de Carmaux a accordé à M. et Mme A...le permis de construire une maison sur un terrain sis rue du Parc, composé des parcelles
cadastrées AV n°79 et 80 ; qu’un recours gracieux ayant été formé à son encontre, le 23 octobre 2006, le maire a informé les pétitionnaires de ce recours, par courrier du 3 novembre 2006, en leur demandant de
justifier qu’ils disposaient d’un droit de passage sur la rue du Parc ; que, par lettre du 30 novembre 2006, il a informé M. et Mme A... de ce qu’il envisageait de retirer le permis de construire accordé le 24 août 2006, en leur demandant de formuler leurs observations sur cette mesure ;
que ledit permis de construire a été retiré par un arrêté du 21 décembre 2006 du maire de Carmaux ; que la commune de Carmaux relève
appel du jugement du 17 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’arrêté du maire de ladite commune du
21 décembre 2006 procédant au retrait du permis de construire accordé à M. et Mme A...;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu’en retenant comme fondés les moyens de légalité interne invoqués à l’encontre de l’arrêté litigieux et en précisant que « pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, aucun autre moyen n’apparaît, en l’état du dossier, également susceptible de fonder l’annulation de la décision attaquée », le tribunal administratif s’est prononcé, ainsi que le prescrivent les dispositions de cet article L. 600-4-1, sur l’ensemble des moyens de la requête ; qu’ainsi le moyen tiré de ce qu’en méconnaissance de l’article L. 600-4-1 précité, le tribunal administratif ne se serait pas prononcé sur les moyens de légalité externe invoqués devant lui par les époux A...ne peut qu’être écarté ;
Sur la légalité de la décision de retrait du 21 décembre 2006 :
Considérant que la commune de Carmaux soutient, en premier lieu, que son maire était tenu de procéder au retrait du permis de construire du 24 août 2006 dès lors que M. et Mme A...ne disposaient pas d’un droit d’accès à leurs terrains, en méconnaissance de l’article UB 3-1 du plan d’occupation des sols ;
Considérant qu’aux termes de l’article UB 3-1 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune : « Accès : (....) Pour être constructible, un terrain doit avoir un accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un passage aménagé sur fonds voisin (...) sous forme d’une servitude de passage instituée par acte authentique ou par voie judiciaire, en application de l’article 682 du code civil.(...) » ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le terrain d’assiette du projet est desservi au nord par une voie d’une largeur de quatre mètres, débouchant sur la rue du Parc et, au sud dudit terrain, par un chemin d’une largeur de deux mètres débouchant sur l’avenue de La Lande ; que s’il ressort, il est vrai, d’un arrêt du 7 juin 1983 par lequel la cour d’appel de Toulouse a déclaré éteinte, faute d’avoir été utilisée pendant trente ans, la servitude d’un mètre de large dont M. et Mme A...disposaient pour rejoindre la rue du Parc à partir de leur parcelle cadastrée AV n° 80, cette même décision de justice a relevé qu’une autre servitude, attachée à la propriété de la parcelle cadastrée AV n° 79, permettait ce même passage vers la rue du Parc, par un chemin de deux mètres de large ; que le chemin dont s’agit a ultérieurement été élargi pour devenir la voie d’une largeur de quatre mètres susmentionnée ; qu’il ne ressort d’aucune pièce du dossier que le droit de passage susmentionné se serait éteint ou aurait disparu ; qu’ainsi, et quelle que soit la nature publique ou privée de la voie en question, M. et MmeA..., propriétaires de la parcelle cadastrée AV n° 79, justifiaient d’un titre leur permettant d’emprunter un passage reliant leur terrain à la rue du Parc ; que, dès lors, les intéressés disposaient d’un accès ouvert à la circulation publique au terrain d’assiette de leur projet de construction ; que, dans ces conditions, le maire de Carmaux n’avait pas méconnu, en délivrant le permis de construire du 24 août 2006, les dispositions de l’article 3-1 du règlement de la zone UB du plan d’occupation des sols, de sorte qu’il ne pouvait légalement décider que l’incertitude quant au caractère privé ou public de cette voie justifiait, pour ce motif, le retrait du permis de construire délivré le 24 août 2006 ;
Considérant que la commune de Carmaux soutient, en deuxième lieu, que le permis du 24 août 2006 méconnaissait les dispositions de l’article UB3-1 dès lors que les accès au terrain de M. et Mme A...ne permettaient pas l’approche des véhicules de lutte contre l’incendie ; que les dispositions de cet article UB 3-1 du règlement du plan d’occupation des sols ont le même objet que celles, également invoquées par le maire de Carmaux, de l’article R.111-4 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors applicable en vertu desquelles « Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l’importance ou à la destination de l’immeuble ou de l’ensemble d’immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l’utilisation des engins de lutte contre l’incendie (...) » ; que les dispositions de l’article 3-1 du règlement du plan d’occupation des sols posent des exigences qui ne sont pas moindres que celles de l’article R. 111-4 du code de l’urbanisme ; que, dès lors, c’est par rapport aux dispositions du règlement du plan d’occupation des sols que doit être appréciée la légalité de la décision contestée ;
Considérant que le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d’assurer la conformité des travaux qu’il autorise avec la réglementation d’urbanisme ; que, dès lors, si l’administration et le juge administratif doivent, pour l’application des règles d’urbanisme relatives à la desserte et à l’accès des engins d’incendie et de secours, s’assurer de l’existence d’une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l’existence d’un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne leur appartient de vérifier ni la validité de cette servitude ni l’existence d’un titre permettant l’utilisation de la voie qu’elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique ; qu’il ressort des pièces du dossier que, comme il a été dit ci-dessus, les requérants disposent d’une servitude de passage sur la voie ouverte à la circulation publique qui dessert leur terrain à partir de la rue du Parc, laquelle voie, d’une largeur de quatre mètres et d’une longueur de quatre-vingt mètres environ, permet l’approche des engins de secours et de lutte contre l’incendie ; qu’ainsi, et comme l’ont relevé à juste titre les premiers juges, en considérant que l’implantation de la construction autorisée par l’arrêté du 24 août 2006 était de nature à porter atteinte à la sécurité publique en limitant notamment l’accès des véhicules de secours et de lutte contre l’incendie, le maire de Carmaux, en retirant ledit arrêté, a entaché sa décision de retrait d’une erreur d’appréciation ;
Considérant que la commune de Carmaux soutient, en troisième lieu, que c’est à bon droit que le permis de construire a été retiré pour méconnaissance des dispositions de l’article UB 3-2 du règlement du plan d’occupation des sols ; qu’aux termes de cet article UB 3-2 : « Les dimensions, formes et caractéristiques techniques des voies privées doivent être adaptées aux usages qu’elle supportent ou aux opérations qu’elles doivent desservir ; Les voies nouvelles doivent avoir des caractéristiques adaptées à l’approche des véhicules de lutte contre l’incendie et d’enlèvement des ordures ménagères ; une largeur de plate-forme au moins égale à 3,5 mètres (...) ; Les voies se terminant en impasse devront être aménagées de telle façon à permettre aux véhicules, notamment de lutte contre l’incendie et de ramassage des ordures ménagère, de faire demi-tour. » ; que toutefois, comme l’ont relevé les premiers juges, ces dispositions, qui s’intègrent dans le 2 de l’article UB 3, relatif à la voirie, et non dans son 1, relatif aux accès, ne concernent que la création ou l’aménagement de voies et non la construction d’immeubles, de sorte qu’elles n’étaient pas opposables au pétitionnaire d’un permis de construire et n’ont pu légalement fonder le retrait du permis de construire délivré à M. et MmeA..., dont le projet ne comportait l’établissement d’aucune voie ;
Considérant, en quatrième et dernier lieu, que la commune de Carmaux soutient que la construction condamnerait une issue et un dégagement initialement prévus sur l’avenue de La Lande par l’arrêté préfectoral du 19 avril 1956 autorisant un lotissement ; qu’elle produit un extrait du cahier des charges d’un lotissement, approuvé par arrêté du préfet du Tarn du 19 avril 1956, dont un article intitulé « voirie « dispose que : « Le terrain est desservi sur toute sa longueur par un chemin privé appartenant à tous les propriétaires voisins, aboutissant directement à l’avenue de La Lande, ainsi que par un autre chemin, bordant le Parc Jean-Jaurès. Ces voies seront aménagées ultérieurement et prises en charge par la commune de Carmaux. (...) » ; que toutefois, la commune de Carmaux ne justifie pas, en tout état de cause, que les parcelles cadastrées AV n° 79 et 80 seraient incluses dans le lotissement concerné et que ce cahier des charges serait opposable aux épouxA... ; que, dès lors, le maire de Carmaux n’a pu légalement fonder la décision contestée sur la circonstance que le projet de construction litigieux condamnerait une issue et un dégagement initialement prévus par l’arrêté du 19 avril 1956 du préfet du Tarn ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la commune de Carmaux n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 21 décembre 2006 par laquelle son maire a procédé au retrait du permis de construire délivré à M. et Mme A...;
Décide :
Article 1er : La requête de la commune de Carmaux est rejetée.
Référence : Cour Administrative d’Appel Bordeaux n° 11BX01041 du 16 avril 2013.
Urbanisme pratique n° 248 du 2 janvier 2014.
Michel Degoffe le 02 janvier 2014 - n°248 de Urbanisme Pratique
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